La robe et la pluie

Francis (prononcez franssisse) Cabrel a chanté la robe et l'échelle, belle comptine évoquant la découverte de l'amour par un jeune garçon.

La mienne de comptine est toute autre, même si un amour est là aussi apparu. Imaginez une demoiselle de 10 ans à peine aux cheveux d'un blond qu'un vénitien n'aurait renié. Son visage fait de timidité juvénile cachée par ses boucles débordantes, un petit nez en forme de l'instrument préféré de Louis Armstrong (lui n'était pas dopé) et un sourire discret mais enchanteur.

La voilà débarquant d'un bus aux portes d'un royaume qui se veut magique. Sa maman l'avait habillée d'une jolie robe longue, dans les roses imprimées. Son sous- pull rivalisait de fraîcheur rosée.

Le soleil était présent abondamment, et puis un peu moins, jusqu'à aller conter fleurette à Blanche -neige et Cendrillon. Il se cacha pour de bon derrière de sombres nuages sortis tout droit de l'antre de Cruella. Ce qui devait arriver, tomba : des gouttes drues, compactes, nombreuses et surtout très mouillées.

Les cheveux de notre effarouchée, ressemblaient maintenant à un champ de blé en été, champ qui aurait été ravagé par un vent tempétueux. Mais rien
n'altérait
sa douce candeur et son émerveillement constant. Son bonheur et sa joie de voir parader les personnages rutilants faisait envie. Après les cheveux, ce fut la robe rose qui tel un buvard absorba l'eau que la pluie envoyait.

On aurait pu la tordre, tant de la tête aux pieds elle n'était que gouttes. Et comme toujours après la côte vient la descente, le soleil écarta doucement mais fermement ces gris nuages afin de reprendre sa place due.

C'est à ce moment seulement que notre puce, transpercée, se rendit compte que sur son dos, un petit sac à dos la faisait ressembler à quasimodo, et ce petit appendice dorsal contenait la protection contre la pluie prévue par la maman.

Toute afférée qu'elle était à sa découverte, à monter son échelle du bonheur, à embrasser des yeux château et carrousel endiablé, elle en avait oublié de se vêtir.

Voilà un effet de la magie de ce sacré Walt qui plus de 60 ans après agit encore sur gente damoiselle et beau damoiseau. Si le prix Nobel de la paix pouvait un jour récompensé tous ces faiseurs de bonheur, qu'il n'oublie pas de l'envoyer là-haut ou Walt et son frère Roy, derrière les nuages sombres, surveillent tendrement ces petits bouts d'homme.